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NOUVELLE MISE A JOUR LE 15 avril 2014

vendredi 5 février 2010

Le 1er R.I. en Alsace (1918)

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L’Alsace, rêve toujours caressé et toujours déçu, vision évanouie aussitôt qu’ébauchée, c’est elle enfin qui s’ouvre, accueillante aux poilus du 1er. Familière et pittoresque, industrieuse et poétique, elle déroule aux regards ses montagnes robustes où rien ne s’escarpe, ses sombres sapinières que déchirent de minces filets d’eau, ses vallées sinueuses peuplées d’usines trépidantes et de gracieux chalets. C’est la terre meurtrie où la Civilisation latine et la Kultur germanique, avant de se heurter dans un choc sanglant, se sont affrontées durant quarante-quatre ans de joutes immatérielles. Le 1er s’attache à elle avec enthousiasme ; dans ses cantonnements de repos à Saint-Amarin, Moosch et Willer, il s’abandonne délicieusement à la chaude hospitalité des populations qui le comblent de gâteries.
Le 31 août, les deux premiers bataillons escaladent l’Hartmanswillerkopf où il relève le 19e. Ils garnissent la crête face à l’est, dominant le Niederwald, la vallée de l’Ill et la vaillante Mulhouse qui, la nuit, s’illumine d’un éclairage féerique ; le bataillon Allard s’établit au sud, dans le ravin du Shil. Un rideau forestier couvre les positions ennemies. Secteur étrange, les compagnies sont disséminées sur des fronts immenses ; les groupes de combat, juchés sur les arrêtes de la montagne, s’enveloppent d’un réseau de fils de fer et guettent dans le ravin les patrouilles ennemies qui s’infiltrent à l’abri du feuillage ; aucune attaque de large envergure, le bombardement limité à un lancement intermittent de torpilles, des embuscades et des coups de main : après le déroulement tragique de l’offensive, c’est le règne de la petite guerre.
Elle a ses héros et ses martyrs. Le 2 septembre, le groupe Jean-Blanc, de la compagnie Carré, résiste vaillamment à un fort détachement des grenadiers allemands, soutenus par des mitrailleuses ; le 12, la 1re compagnie repousse une nouvelle attaque, mais elle perd son chef, le lieutenant Tranchant, enseveli par l’éclatement d’un minen, avec les douze hommes du service de liaison et du poste téléphonique. Le 20, au nord de l’Hartman, une section allemande se heurte à la froide obstination de deux courageux soldats et laisse entre leurs mains un sous-officier blessé. Le 1er bataillon riposte sur le champ ; l’adjudant Vanel, à la tête de trente hommes, se glisse sous les sapins jusqu’aux tranchées ennemies ; aperçu au moment où quatre chasseurs spécialistes coupaient les fils de fer, il doit se replier. Les jours s’écoulent de la sorte, émaillés d’incidents imprévus jusqu’au 16 octobre où le premier est relevé par un régiment américain qui s’est distingué à l’offensive de Saint-Mihiel.
Il remonte la vallée de la Thur jusque Moosch et, par la fameuse route Joffre, gagne en autos la ville de Masseveaux, à la pointe sud de l’Alsace. Le 19 octobre, la riante cité s’éveille aux sons de la musique, les édifices publics sont pavoisés d’emblèmes tricolores. Les maisons, d’une sobre élégance sous un aspect vieillot, s’enguirlandent et se décorent ; les habitants endimanchés se massent autour de la grande place, derrière les notabilités communales et les enfants des écoles, si gentils dans leurs costumes nationaux. C’est la petite Patrie qui revêt, avec un brin de coquetterie, la séduisante parure de son particularisme pour fêter les soldats de la France immortelle. Le 1er de Ligne doit recevoir la Fourragère aux couleurs de la Médaille Militaire. Le général de Castelnau, commandant le groupe des Armées de l’est, passe sur le front des bataillons et lit d’une voix sonore la quatrième Citation du régiment :

Tandis qu’un tambour ouvre et ferme

Les guillemets sombres du ban,

Il enroule la Fourragère à la Hampe du Drapeau, le baise longuement et fait rendre les honneurs. Alors, scène ravissante et d’une délicatesse toute française, une nuée de jolies fillettes fendent les rangs des compagnies et, dans un sourire mutin, accrochent elles-mêmes à l’épaule des poilus le symbole de leur gloire.


Source : SHD, Historique anonyme. Cote A2g2849
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