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Le 11 août 1914, sous le commandement du lieutenant-colonel DUCHÊNE, le 218e R. I. s'embarque à Pau, à l'effectif de 37 officiers et de 2.174 sous-officiers, caporaux et soldats. Le 13 août, il débarque à Toul et le 14, il fait étape sur Avrainville et Manoncourt. Tout fait supposer que le régiment va se battre au-delà des plaines de Woëvre, mais brusquement, le 19 août, il reçoit l'ordre de s'embarquer à Toul pour la gare régulatrice d'Hirson : l'ennemi viole la neutralité de la Belgique pour nous attaquer par le nord avec le gros de ses forces.
Le 20 août, après avoir débarqué à Fourmies, le régiment stationne à Trélon.
Le 21 août, à 11 h15, il franchit la frontière et est chaleureusement acclamé par la population belge sur tout le parcours de la route de Sivry.
Passant par Sivry et Beaumont, le 218e R. I. arrive à Strée où le combat s'engage dans la soirée ; mais, placé en soutien, il n'intervient pas directement dans la bataille.
Le 24 août, il est chargé d'organiser un dispositif de repli à la sortie nord-ouest de Strée ; les éléments de couverture et les travailleurs sont vigoureusement pris à partie par l'ennemi et, vers 11 heures, le régiment reçoit l'ordre de se replier sur Clermont, tout en cherchant à établir une liaison entre le 3e et le 18e corps d'armée. Les uhlans harcèlent l'arrière-garde ; quelques coups de feu sont échangés ; ils n'occasionnent heureusement aucune perte de notre côté. Le colonel manœuvre son régiment à travers bois, afin d'échapper aux embuscades de l'ennemi. Il y réussit et débouche enfin sur les hauteurs de Clermont.
Dans Clermont se trouve la 38e division qui a beaucoup souffert à l’attaque de Charleroi et qui prend du repos en halte gardée.
Le régiment se reporte sur Beaumont et, harassé de fatigue, il s’installe le soir, à 21 heures, à Lorroir, en cantonnement d’alerte.
Le 25 août, à la pointe du jour, il fait une marche de flanc sur Felleries. Partout à l’horizon les villages brûlent et les routes sont encombrées de gens de toutes conditions fuyant les hordes allemandes. C’est la désolation.
Le 26 août, le régiment continue sont mouvement de repli sur Étrœung, la forêt de Nouvion, Erloy, Marle, Pargny-les-Bois et arrive, le 29 à Chevresis-Monceau.
A ce moment, il reçoit l’ordre de faire demi-tour et de prendre la direction Villers-le-Sec ─ Ribemont.
La bataille s’engage en avant de Ribemont et le 218e R. I. entre dans le dispositif de combat comme soutien d’artillerie. Un succès local couronne ce retour offensif, mais le gros de l’armée allemande continue sa marche victorieuse sur Paris et nos troupes sont contraintes de continuer leur mouvement de retraite.
Le 30 août, le régiment cantonne à Couvron à 1 heure du matin.
Le 31 août, il se dirige vers Laon, marche toute la nuit sur des routes encombrées de véhicules de toutes sortes, passe le 1er septembre à Cerny-les-Bucy, Molinchart, Mons-en-Laonnois, Urcel, Pargny-Filain, Vailly, Presles, Courcelles, Bazoches, Cherry-Chartreuse et arrive après un repos de trois heures, le 2 septembre au soir, à Vincelles, près de Dormans.
Le 3 septembre, l’ennemi talonne l’arrière-garde dont fait partie le régiment. Départ par alerte, le matin à 4 heures, et passage de la Marne au pont de Dormans. Itinéraire : Chavenay, La Chapelle-Monthodon, Le Breuil, Verdon. Les vivres manquent : on réquisitionne.
Après quelques heures de repos, le mouvement de repli continue par Coubouvin, Artonges, Villemoyenne, Mont-Coupot, Montmirail. Marche de nuit par Tréfols ; cantonnement le 5 septembre près Provins. Cette date marque la fin de cette manœuvre rétrograde, mais admirable de cohésion, et qui restera célèbre dans l’histoire, sous le nom de retraite de Belgique.
En onze jours, le régiment a parcouru plus de 300 kilomètres sur des routes encombrées, par une chaleur étouffante, au milieu de privations de toutes sortes.
Les hommes ne sont pas cependant abattus, le moral est bon et ils ne demandent qu’à bondir sur le Boche.
Le magnifique ordre du jour du général JOFFRE : Une troupe doit mourir sur place plutôt que de reculer, fait vibrer tous les cœurs et, le 6 septembre, l’armée française tout entière part à l’assaut des positions occupées par les troupes du Kaiser.
Le 218e R. I. fait partie du dispositif d’attaque comme soutien de l’artillerie et traverse Villers-Saint-Georges, Montaulivet et La Haute-Épine. L’ennemi en retraite creuse ses premières tranchées, il semble vouloir essayer de stabiliser sa ligne de défense en avant de Montmirail : il n’y peut réussir.
Le 10 septembre, le 218e fait son entrée dans Château-Thierry que l’ennemi vient d’abandonner ; quelques Allemands cachés dans les maisons sont faits prisonniers.
Les 13 et 14 septembre, le régiment cantonne à Baslieux-les-Fismes.
Les 15, 16 et 17 septembre, le 218e organise défensivement la lisière nord du bois de Roucy. Il éprouve quelques pertes par suite de bombardement.
Le 18 septembre, le corps reçoit l’ordre d’occuper les tranchées au nord de Beaurieux. Le lieutenant-colonel ESTÈVE prend le commandement du 218e à la date de ce jour.
Du 19 septembre au 26 octobre, occupation et mise en état de défense des tranchées de Beaurieux. Le régiment subit à cet endroit plusieurs séries de bombardements intenses ; le commandant DUPONT, commandant le 5e bataillon, est tué ; le capitaine LACORDELLE, commandant la 19e compagnie, et le médecin-major FULCRAND sont blessés.
Pertes en hommes de troupe : une vingtaine de tués ; une trentaine de blessés.
Le 27 octobre, le 6e bataillon va occuper les tranchées du Blanc-Sablon, au sud de Craonnelle, où il s’installe à la faveur de la nuit. Le bataillon éprouve quelques pertes, surtout au moment de la relève.
Les 28, 29 et 30 octobre, le bombardement devient plus intense et les pertes augmentent : 20 hommes tués, blessés ou disparus au 6e bataillon.
Le 31 octobre, le régiment tout entier occupe le plateau de Paissy où il relève le 12e R. I.
Le 23 novembre, le lieutenant-colonel ESTÈVE quitte le commandement du régiment et est remplacé par le commandant PRADINE.
Le 218e R. I. occupe toujours le plateau de Paissy. Il mène avec stoïcisme et confiance cette vie de tranchée, si pleine de dangers et de privations de toutes sortes.
Les hommes souffrent du froid et de l’humidité ; les abris manquent, les matériaux font souvent défaut et la nourriture laisse à désirer. Chaque jour, le bombardement fait de nouvelles victimes. Qu’importe ! le poilu béarnais conserve toujours sa bonne humeur, travaille avec les moyens qu’il a, se contente de peu et conserve sa foi inébranlable dans l’avenir. On lui a dit de tenir : il tiendra jusqu’au bout.
Source Historique du 11ème Régiment de Cuirassiers - Librairie Berger-Levrault - Nancy – Paris - Strasbourg
Avec l’aimable autorisation de Jean-Luc DRON